George Sand pour ceux qui ne le savent pas s’appelait de son vrai nom Amantine Aurore Lucile Dupin, baronne Dudevant.
En 1838, elle décide de passer l’hiver à Majorque avec son amant qui n‘est autre que Frédéric Chopin.
De ce voyage elle rapportera un livre intitulé : Un hiver à Majorque.
Avant de lire cet ouvrage je pensais que les Majorquins la portaient dans leur cœur car elle fut sans doute l’un des premiers écrivains à consacrer un livre à ces îles.
Aussi quelle ne fut pas ma surprise de ne pas voir son buste à côté de celui de Frédéric Chopin dans le jardin du désormais célèbre village de Valldemossa où ils résidèrent durant tout un hiver.
Je fus d’autant plus étonné qu’avant de visiter ce village j’avais lu une interview du conservateur de la Sierra Tramuntana ( sierra inscrite au patrimoine mondial de l’humanité où se trouve Valldemossa), expliquant que Majorque devait en grande partie sa popularité à George Sand et non à Michael Douglas et Catherine Zêta Jones qui ont acheté une magnifique maison dans les parages…
Prompte à la critique, je mis cette absence sur le compte du « machisme catalan » mais car il y a toujours un mais, j’avais oublié une chose : lire ce livre.
En rentrant au bateau je décidais donc d’acquérir cet ouvrage sur ma liseuse et commençais à lire le livre en question.
Il ne me fallut pas bien longtemps pour comprendre pourquoi Dame Sand n’est pas portée au pinacle par les majorquins.
Jugez plutôt :
« Nulle part je n’ai vu travailler la terre si patiemment et si mollement. Les machines les plus simples sont inconnues; les bras de l’homme, bras fort maigres et fort débiles, comparativement aux nôtres, suffisent à tout, mais avec une lenteur inouïe. Il faut une demi-journée pour bêcher moins de terre qu’on n’en expédierait chez nous en deux heures et il faut cinq ou six hommes des plus robustes pour remuer un fardeau que le moindre de nos portefaix enlèverait gaiement sur ses épaules. »
« L’Espagnol est ignorant et superstitieux; par conséquent il croit à la contagion, il craint la maladie et la mort, il manque de foi et de charité, il est misérable et préssuré par l’impôt; par conséquent il est avide, égoïste, fourbe avec l’étranger. Le cultivateur français a une persévérance et une énergie que le Majorquin mépriserait comme une agitation désordonnée.
Les Majorquins sont des valets enchaînés par la paresse ou la misère à la vanité de leurs patrons.
Et quand on voit de vastes terrains en friche, l’industrie perdue, et toute idée de progrès proscrite par l’ineptie et la nonchalance, on ne sait lequel mépriser le plus, du maître qui encourage et perpétue ainsi l’abaissement moral de ses semblables. »
Évidemment tout cela n’est pas très flatteur et ne correspond guère à l’image du peuple majorquin qui est accueillant, efficace, travailleur, bref un peu tout le contraire de ce que décrit George Sand dans son livre et qui d’ailleurs lui a été reproché à l’époque.
Il faut lire ce livre comme une curiosité avec le sentiment un peu pervers de tenir une petite charge explosive entre ses mains. C’est tellement politiquement incorrect que ça finit par en devenir jouissif et rien que pour ça, je le recommande vivement…


