Sardaigne nous revoilà !
Après deux années sans naviguer, nous rejoignons Omer à Arbatax.
Cette fois nous avons pris notre voiture pour emporter des tas d’affaires sur le bateau. Nous commençons par nous rendre à Nice où nous avons réservé une place sur un ferry direction Golfo Aranci. La traversée se fait de nuit et c’est avec un plaisir non dissimulé que nous embarquons.
Petit apéritif au bar avec vue sur les côtes italiennes, dîner au restaurant du bord puis retour à la cabine pour une nuit sans encombre.
Le lendemain matin lever à 6h, débarquement à 7 et à 8h cappuccino et croissants en terrasse à Olbia, servis par une sympathique serveuse.
L’affaire s’annonce bien.
Omer se trouve au chantier Cantiere Valdes.
Dans la famille Valdes, il y a le père, fondateur du chantier, toujours en activité, premier arrivé et souvent dernier parti, s’occupant des travaux de finitions et veillant avec une autorité bienveillante aux différentes activités, la mère, ancienne gérante, droite comme un i, assise toute la sainte journée à côté de sa fille Claudia, une petite brune dynamique et souriante, secrétaire, trésorière, gestionnaire; le fils Massimo, actuel directeur, autoritaire mais n’épargnant pas sa peine, présent voire omniprésent, le beau-fils, mari de Claudia et bras droit de Massimo ainsi que quatre ou cinq employés, sans doute des cousins Valdes, dont Alex, un petit gars au corps noueux, serviable, infatigable travailleur, notre chouchou.
La famille serait incomplète sans parler des quatre chats et cinq chatons qui font le bonheur de la fille de Massimo, une préado vive et bavarde qui passe ses journées à s’occuper d’eux.
Ce petit chantier familial est un bijou de professionnalisme et d’efficacité. Hyper bien équipé, le chantier possède un énorme travel lift, une aire de carénage et un atelier de bricolage digne d’une station spatiale. Comme le terre-plein est assez petit l’équipe se livre chaque jour à un véritable sudoku pour déplacer un bateau, en accueillir un nouveau, en mettre un autre à l’eau. Ici chacun travaille de 8 heures à 18 heures sous un soleil de plomb, dans la poussière du chantier, des odeurs de vernis, de peinture et de gasoil et des bips bips du travel lift. Et pourtant personne ne se plaint.
La seule ombre à ce tableau familial est qu’aucun de ces sympathiques personnages ne parle un traître mot d’anglais ou de français et pire, chacun parle aussi vite qu’un journaliste sportif commentant la dernière coupe du monde de foot, Claudia et sa nièce battant tous les records de vitesse. C‘est donc en baragouinant un vague espano-italien, en utilisant le langage des signes et en hochant beaucoup la tête (comme les chiens à l’arrière des voitures) que nous tentons de comprendre et rarement de nous faire comprendre.
Nous pensions passer trois ou quatre jours au chantier, le temps de faire les réparations d’usage,l’antifouling et autre polishage mais finalement ce délai fut largement dépassé.
Perchés sur nos bers (béquilles) dans la chaleur étouffante du chantier, nous avons désespérément attendu un appel de Sandro, le mécanicien qui devait faire la révision du moteur. Celui-ci, un grand blond aux yeux bleus qui ressemble plus à un officier de la marine suédoise qu’à un mécanicien sarde était passé voir le moteur dès le lendemain de notre arrivée. Nous pensions que l’affaire serait rondement menée et que nous pourrions mettre le bateau à l’eau très vite mais car il y a toujours un mais :
— the filters have to be changed but I don’t have them in my stock. La prossima settimana (la semaine prochaine), good, good filters, next lunedi (lundi prochain), good ! Ok for you ?
— Lunedi ? La prossima settimana, in seven days, no, no good for us !
Lunedi est passé depuis trois jours et nous attendons toujours un appel de Sandro. Domani , domani…
Pour tromper notre attente nous décidons d’aller faire un tour dans la montagne sarde et de visiter le village d’Orgosolo réputé pour ses fresques politiques.
L’Histoire raconte qu’en 1969 un camp militaire aurait du être être installé sur des terres appartenant aux bergers du village. Très vite la population décide de s’opposer pacifiquement à ce projet. Les premières fresques murales apparaissent alors sur les murs du village. Par la suite des artistes étrangers attirés par cette drôle d’histoire vinrent rejoindre les artistes locaux. Et c’est ainsi que le mouvement de la peinture murale naquit. Depuis cette pratique a fait florès et désormais tous les murs du centre ville sont peints ainsi que ceux des villages voisins.
De retour au chantier nous attendons un appel de Sandro. En vain.
Enfin le 17 juin, soit quinze jours après notre arrivée, nous mettons Omer à l’eau et allons nous amarrer à une place de ponton.
Quel plaisir de retrouver enfin le plancher de la mer !









