Deux jours plus tard, nous revoilà sur la route en direction d’Alghero, il fait toujours aussi chaud mais cette fois nous sommes dans une Fiat Punto climatisée.
A douze heures nous récupérons Laura à l’aéroport et repartons directement à Carloforte.
En route nous lui faisons part de nos déboires et de notre espoir de repartir vite. Cela fait maintenant dix jours que nous sommes coincés à Carloforte sans aucune nouvelle de notre joint tournant. Laura sentant que nous avons une petite baisse de moral réagit positivement, arguant qu’un petit retard fait partie voyage…et elle en sait quelque chose…
Le petit retard en question va encore durer trois jours lorsqu’enfin Carmela nous annonce que le joint tournant est arrivé et que le mécanicien du chantier pourra le changer dès le lendemain.
Mais car il y a toujours un mais, alors que le bateau est au chantier, Carmela nous appelle pour nous dire que l’un des silent blocks, une des pièces anti vibration sur lesquelles le moteur est posé, est cassée. Je suis convaincu que c’est le mécanicien qui l’a endommagé en sortant le moteur mais elle m’affirme que non.
Carmela :
–– You will have to change the four silent blocks (Il va falloir changer les quatre silent blocks.)
–– Do you know where to fine them (Vous savez où les trouver ?)
–– I’II fine out, but I can’t promise you anything. (Je vais me renseigner mais je ne vous promets rien.)
Nous sommes convaincus que nous allons devoir encore attendre une semaine l’arrivée des pièces mais à notre grande surprise Carmela nous rappelle quelques heures plus tard pour nous dire qu’elle en a trouvé à Cagliari et qu’un taxi doit les apporter dans la soirée.
Carmela c’est vraiment la femme de la situation !
Le lendemain nous nous rendons au chantier et constatons que le mécanicien est entrain de travailler sur Omer.
–– Finirà stasera. Puoi ritirare la barca alle sei. (Ce sera fini ce soir. Vous pouvez venir chercher le bateau à dix huit heures.)
A dix huit heures précises nous sommes au chantier, le mécanicien n’est pas là mais un de ses collègues nous propose de nous accompagner jusqu’à notre place de port pour vérifier que tout fonctionne bien.
A peine dix minutes nous sépare de notre place. Nous devons simplement sortir du chantier, longer une digue en pierres puis emprunter le chenal d’accès à la marina.
Un fort vent de nord ouest souffle vers la longue digue de pierres, nous sommes au moteur lorsque celui-ci soudainement s’arrête. L’employé se précipite pour chercher la panne mais ne la trouvant pas appelle en urgence Carmela qui aussitôt envoie un marinero en zodiac. Je constate alors que le mécanicien a tout simplement oublié d’ouvrir l’arrivée d’essence du moteur.
Le marinero arrive, nous lance un bout et commence à nous tracter.
Encore deux minutes et nous étions sur les rochers !
Pendant ce temps l’employé du chantier réussit à réamorcer le moteur et nous arrivons enfin à notre place sous l’œil attentif de Carmela qui au fond d’elle doit prier tous les saints pour que nous partions le plus vite possible et que ses emmerdes s’arrêtent.
Le lendemain nous passons lui dire au revoir et lui offrons un bouquet de fleurs pour la remercier.
Elle est visiblement émue. Le matin même Laurence qui passait devant la capitainerie a entendu le mécanicien lui hurler dessus à notre sujet. Sans doute l’a t-elle un peu rudoyé pour qu’il se mette une pile et répare ses conneries. Être une femme dans ce milieu de mecs machos ne doit pas être facile et les fleurs une denrée plutôt rare.
–– Despite all your setbacks you are a lucky guy, Hugo, last night was hot… (Malgré tous vos déboires vous êtes un gars chanceux, Hugo, hier soir c’était chaud…)
Bon voyage and take care. (Bon voyage et faites attention à vous.)
–– Bye Carmela, on ne t’oubliera pas.


